Hélène Garrigues
Dans les années 70, Hélène mijote dans la marmite de parents mélomanes ouverts à toutes les ondes (pas micro!). Elle chante Boby Lapointe mais n’y comprend goutte. Elle aime les grands barbus de la chanson française, à l’époque c’est Le Forestier et Moustaki. A 20 ans, sous l’influence salvatrice du coup de pied, si tendrement asséné par Philippe Léotard, elle décide de travailler son grain de voix. Formation et pratique classique, elle veut chanter la reine de la nuit …. En 2004, la préparation d’un hommage a Jean Cocteau lui fera trouver sa vrai voix. Dès lors, hantée par Montmartre et le spectre de Mme Arthur, elle habite un répertoire français, peuplé de caractères en marges, dont l’hygiène de vie se résume à l’ivresse et la séduction. Ses marraines? Barbara, Juliette Greco, Piaf, Patachou, Renée Lebas, Jacqueline François.
Depuis Octobre 2013, elle forme avec Jean-Marc Dos Santos le duo Brin d’Amour. Ils écrivent ensemble Les Saisons du Plaisir, un spectacle mêlant comédie et reprises de chansons françaises dont l’amour est le terreau fertile.

Jean-Marc Dos Santos
On ne peut pas grand chose contre une chanson.
A l’instar du « bruit qui court » de mon cher Hugo, la chanson court le pavé, jusqu’à devenir chanson des rues.
elle écrase sa gauloise, boit le dernier verre puis se glisse sous la porte la plus close, s’insinue enfin dans l’oreille la mieux bouchée ou la plus distraite et commence son travail.
Car si la poésie fait œuvre, la chanson fait juste son boulot :
Te fouailler le dedans.
Et même si tu ne la connais pas, la chanson, elle, te sait mieux que toi même.
Alors, elle vrille, chignole, villebrequine jusqu’à titiller le meilleur de toi, celui qui pleure de rire, celui qui rit pour étouffer les larmes, qui ne se prend pour rien ni personne, celui qui est « pour ce qui est ».
Doté d’une personnalité luxuriante mais floue (ébouriffée serait plus juste), j’incarne facilement. J’interprètre.
Par conduction comme le cuivre fait relais à l’électricité, je suis enchanté puis chanté par la chanson.
J’y suis venu minot.
Les départs en vacances étaient pour moi une punition, j’avais mal au cœur en voiture et mes parents m’ont appris à chanter pour détourner mon attention de la nausée automobile.
Lui, l’hidalgo avait, dans sa prime jeunesse, donné dans le Bel canto aux terrasses des bistrots de l’île Saint Denis et connaissait son Tino Rossi (la période bleue, napolitaine, pas la rose cacochyme) sur le bout des cordes vocales.
Elle, la zazoue avait été « fine diseuse » pour le Parti Communiste, (ce qui consistait m’expliqua t’elle bien plus tard à déclamer Aragon ou Eluard vêtue d’une robe diaphane et froufroutante).
Elle savait son Piaf par cœur, adorait Damia, Fréhel et Lys Gauty de ‘Mon brave Pato » au « Chaland qui passe ».
La combinaison de la gouaille expressionniste parigote et du sucre vocal latino méditerranéen m’immunisa à jamais contre le mal des transports terrestres, aériens et maritimes et fit de moi ce que je mettrais toute ma vie à devenir : un chanteur.
De la compagnie Bernard Lubat (intégré à 20 ans) à Pierre Barouh, devenu mon grand frère en chanson, en passant par des collaborations avec des jazzmen, des musiciens de Samba (presque dix années passées au Brésil), j’ai fini par comprendre : Comme la danse de Jean Babilée : la chanson est un secret partagé. Alors, je le partage…